(E)skat(ologie)

J'ai rencontré la musique de Skat en surveillant les sorties de Karat. Le Karat 16 s'intitulait The Day We Met et on aurait déjà dit un signe. Postcard c'était comme une fille croisée dans les toilettes d'un club, déjà enfuie quand son parfum m'a touché.

Le volume de la chaîne réglé par hasard sur son plus haut niveau, Inuite Disco s'était glissé dans une playlist contenant du matériel ordinaire, et m'a interpellé comme un regard sévèrement séducteur à la fermeture d'une porte d'ascenseur.

Sophistiquées et lascives, ces demoiselles ne manquaient décidement ni de formes ni d'arguments, présentant successivement sourires micro-housey, chevilles dub-hop et décolletés minimaux techno un point c'est tout.

Avec le Elusive EP sorti cette année, j'avais trouvé de nouvelles partenaires pour pratiquer un moment le plus-si-affinités. Mais on commençait à peine à prendre nos marques que myspace me parlait au milieu d'un rêve érotique de la fin mai : « entre des remixes dans les semaines à venir, un morceau sur la prochaine compil Karat et un nouveau maxi a la rentrée, « Skat, ton fournisseur de fantasmes TM » ne va pas tarder à faire parler de lui ».

Qu'à cela ne tienne, maintenant Fluokids prend les devants, pose les deux liens qu'il faut, les cinq questions qui marchent, et fais les présentations, le reste vous appartient, comme on dit à la télévision.

Sur ton blog, il est dit que tu as commencé la musique comme beatmaker hip hop, tu peux faire un flashback et détailler un peu à quoi correspond cette époque pour toi ?

C'est une époque épique... Je me cherchais évidemment mais j'avais la chance de bosser avec un pote (Ajevi) qui faisait des beats aussi pour le groupe, il avait un ASR 10 ! J'ai tout appris la dessus mais bien avant ça, j'avais commencé a faire des boucles avec une platine K7 et avec une platine vynil, c'etait du bricolage mais avec mes potes on avait rien... Alors je prenais des petits morceaux sur une K7 que je faisais repeter. C'était assez long a faire. Avec l'ASR 10 et le sample, j'ai raté 2 années consécutives de fac. Enfin, disons quie j'étais en formation quoi. C'était tres interessant et assez vite, j'ai eu ma patte et les gars appréciaient et en redemandaient. On contoyait pas mal de groupes dont certains sont toujours la, je ne citerais personne a dessein. On écoutait des tonnes de skeuds et on fumait beaucoup (et je buvais beaucoup de 8.6 aussi). Cela dit j'écoutais pas mal de trucs a coté et beaucoup de house, depuis 89 en fait je n'ai jamais décroché, c'est la hip house avec Tyree Cooper et Simon Harris qui m'ont amené naturellement a la house ! Je me faisait régulieremnt reprocher d'écouter ça d'ailleurs. Et puis le format musical hip hop tournait un peu en rond, on ne pouvait rien essayer sauf si ça plagiait les ricains genre Blackmoon, Pete Rock, Das Efx ou encore Smiff and Wessun pour ne citer qu'eux. Donc pour résumer cette époque : un mal nécessaire !

Comment définirais-tu ta musique ? A quel état d'esprit est-ce qu'elle correspond ?

Je ne saurais la définir, elle change beaucoup je pense car j'explore constamment, j'essaie beaucoup de choses avant de sortir un track et de le présenter. Je ne pense pas aborder la musique dans tel ou tel état d'esprit, ce sont des moments, des trains de pensées (train of thoughts), des images, des ambiances mais je n'ai pas de buts précis, je laisse aller c 'est surement pour ça que je prends un plaisir extraordinaire a la faire, j'en ai besoin d'ailleurs maintenant. En revanche, je m'empeche de tomber dans le trop dark ou le trop facile. Je passe beaucoup de temps a chercher des sonorités qui me plaisent a construire des séquences, je peux écouter des boucles pendant des heures sans rien trouver a retravailler dessus, c'est un bon test pour savoir si la loop est bonne cela dit. Ce que j'y vois, ce que j'y mets est assez abstrait et tres personnel.

Comment s'est fait la connexion avec les gens de Karat ?

Nous nous connaissons depuis longtemps, nous venons de la même ville (Rouen) nos itinéraires musicaux se sont reconnus et croisés la bas, j'étais DJ hip hop et je faisais des beats pour mon groupe mais parallelement, je fréquentais les DJ's et les soirées techno (même hardcore !) et house de l'époque (déjà avec A Jackin Phreak !). Les Katas, eux, avaient le shop en bas de chez moi, j'y passais souvent. Mon plus grand souvenir avec eux, outre certaines soirées, c'est quand ils ont organisé une teuf en plein centre ville lors d'une fete de la musique. On est en France donc le quartier a été bouclé par les CRS en 20 minutes, ils arrivaient de partout, alors que tout le monde était dans un pur état d'esprit c'était jouissif. Apres ça, on s'est un peu perdu de vue car je suis parti vivre à Paris, puis, eux aussi, un peu plus tard. On s'est recroisés avec le shop (au métro Parmentier) en fait mais le son avait changé et j'ai pris une grosse claque, décisive. Les Katas ont toujours été présent dans ma vie musicale et sont des amis tres proches. Ils sont une référence pour moi, dans la musique évidemment car ils m'ont nourris d'improbables et de fondamentaux et puis ils m'ont donné ma chance. Je les aime profondément.

Quel est ton environnement musical, les artistes que tu écoutes, ceux qui t'inspirent, ceux avec qui tu traines, ceux dont tu te sens proche ?

Mon environnement musical est très large, je suis sensible a beaucoup de musiques. Mon humeur étant changeante, la musique l'accompagne. De la pop, du folk, beaucoup de classique et surtout du baroque, je suis un inconditionnel de Jordi Savall par exemple, de la house évidemment, tout ce qui me touche en fait, ma collec est large ! J'ai évidemment quelques disques fétiches, ainsi, le Possible Music de Brian Eno et John Hassel. C'était le générique des émissions radio de mon père et ça me faisait flipper, ça me fascinait, j'ai compris plus tard l'extraordinaire complexité et la richesse de cette oeuvre incomparable. En ce moment j'écoute beaucoup une BO de Nick Cave et Stuart Staple, le chanteur de Tindersticks en solo... Et le soir pour m'endormir du poême harmonique (XVIII eme siècle) Anthoine Boesset, "Je meurs de mourrir". Bouleversant. Etc. etc. J'ai évidemment pas mal de potes dans la musique et principalement issus de la scene house et techno minimale. Noze sont de tres bons et tres proches amis, ainsi que Sety (Circus Company), Cabanne, Chloé, Akufen, Krikor. Bref, tout le gratin de la house française. J'ai cette chance, tous des bons amis, tous des compagnons de boissons et de bouffe (très important chez nous, mon QG c'est Julien Caviste rue Charlot à Paris, un référence et un grand ami). Amis de picole de longue date, nous avons créé un concept, un mode de vie presque : vins fins et house du terroir. Nous ne jurons que par ça !

Tu t'es retrouvé à jouer à la télévision, ça a eu un intérêt particulier pour toi ?

C'était sur Direct 8, et non, aucun intérêt. Le décalage entre ce que nous représentions et la façon dont ils perçevaient la chose était bien trop grand pour qu'il se passe quelque chose. Nous n'étions pas a notre place. Ces gens la sont incultes et ne s'interessent pas vraiment au truc. Je n'aime pas ce milieu et cette musique n'y a pas sa place non plus.

Morceaux en écoute sur :

http://www.myspace.com/leskat
http://elusive.blogspirit.com/